Conférence – octobre 2018

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L’accord collectif de travail

d’après les ordonnances du 22 septembre 2017

Par Ylias Ferkane – IRERP (Institut de Recherche sur l’Entreprise et les Relations Professionnelles) – Université Paris Nanterre

Paris, le 13 octobre 2018

De certaines analyses formulées à propos des cinq ordonnances du 22 septembre 2017, semble se dégager un diagnostic partagé. Ces ordonnances constitueraient une « rupture majeure »1 , une « étape significative, décisive d’un changement progressif de modèle »2. Émergerait ainsi un « nouveau modèle du droit du travail »3. Dotée d’un fort pouvoir évocateur, la notion de modèle permet de réaliser une économie de langage appréciable. En effet, une fois le modèle identifié, il est possible de mobiliser un cadre conceptuel parfois imposant sans avoir à en détailler systématiquement les rouages. Voilà qui explique en partie, dans certains milieux savants, l’engouement provoqué par la notion de modèle. Cette « mode des modèles »4 est particulièrement flagrante en droit social où il est fréquemment question de « modèle social »5.

La notion de modèle est ici employée pour désigner un état du droit du travail comme branche du droit étatique à un moment donné6. A l’instar des changements d’état de la matière en thermodynamique, le droit du travail connaîtrait donc, d’après certains observateurs, un changement d’état. Le « renforcement » annoncé de la négociation collective contribuerait grandement à ce processus7. A ce titre, la loi du 15 septembre 20178, a autorisé le Gouvernement à prendre par voie d’ordonnance les mesures relevant du domaine de la loi pour « reconnaître et attribuer une place centrale à la négociation collective, notamment la négociation d’entreprise » et pour « favoriser les conditions de mise en œuvre de la négociation collective et favoriser son développement ». Ainsi, si nouveau modèle du droit du travail il y a, son apparition serait due en partie à la centralité nouvelle acquise par la négociation décentralisée. Il est difficile de résister alors à la tentation de percevoir dans l’évolution ici décrite, l’émergence d’un nouveau modèle de l’accord collectif de travail participant du nouveau modèle du droit du travail.

Qualifier l’accord collectif de travail de modèle tient de la gageure. Bien que clairement attestée et enregistrée, l’utilisation de la notion de modèle reste encore assez peu interrogée en droit. Elle s’avère pourtant particulièrement féconde. Le champ lexical lié au modèle est particulièrement remarquable. Pour s’en tenir au français « les mots pour le dire […] sont loin de manquer, […] adjectif et/ou substantif, ils offrent aux chercheurs s’intéressant au modèle une palette de qualificatifs où la nuance est toujours possible comme le montre la suivante énumération : classique, canonique, archétypal, parfait, standard, prototype, paradigme, parangon, exemple, etc. bref modèle »9. Ainsi, bien que la polysémie de la notion obscurcisse sa compréhension, elle peut également être mise au service de l’analyse.


1. P. Adam, « La négociation (collective) sans la négociation À propos de l’article 8 de l’ordonnance n° 2017-1385 du 22 septembre 2017 », Sem. soc. Lamy, 2017, n° 1790.
2. I. Meyrat, « Droit du travail et droits des travailleurs : le grand désarmement », Droit ouvrier, avril 2018, p. 207.
3. P. Lokiec, « Le nouveau modèle du droit du travail est-il viable ? », Sem. soc. Lamy, 2017, n° 1781.
4. M. Fontanel, N. Grivel et V. Saintoyant, Le modèle social français, Débat public, Odile Jacob, 2007, p. 9.
5. Cette notion désignerait, selon certains auteurs, « l’ensemble des principes, des règles et des institutions qui organisentles relations sociales dans un pays » et n’impliquerait pas de « jugement de valeur ». M. Fontanel, N. Grivel et V. Saintoyant, op. cit., p. 11. L’exposé des motifs de la loi d’habilitation du 15 septembre 2017 appelle d’ailleurs à « une véritable rénovation de notre modèle social ».
6. L’expression « droit du travail désigne-t-elle indistinctement une branche, c’est-à-dire l’un des sous-ensembles de règles identifiables au sein du droit de la République française, et une discipline » : A. Jeammaud, M. Le Friant et A. Lyon-Caen, « L’ordonnancement des relations du travail », D., 1998, p. 359.
7. Ordonnance n° 2017-1385 du 22 septembre 2017 relative au renforcement de la négociation collective.
8. Art. 1er de la loi n° 2017-1340 du 15 septembre 2017 d’habilitation à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du dialogue social.
9. C. Giudicelli, « À propos du modèle », América : cahiers du CRICCAL, vol. 1, 2005, p. 7.

La notion de modèle est, il est vrai, porteuse d’une dualité fondamentale. Elle possède une double dimension descriptive et prescriptive : un modèle est idée mais aussi un idéal. En effet, le modèle « renvoie à ce qui est, au Sein […] en ce sens, il est descriptif », idéel, mais de l’autre, il « désigne ce qui doit être, le Sollen […] dans cet esprit, le modèle […] est un idéal, […] en ce sens, le modèle est aussi prescriptif »10.

Ces précisions d’ordre terminologique étant apportées, il reste alors à déterminer ce que la notion de modèle permet de dire à propos de l’accord collectif de travail rapporté aux ordonnances du 22 septembre 2017. Sans surprise, l’accord collectif de travail semble bien être érigé au rang de modèle idéal. En cela, les ordonnances de l’automne 2017 ne marquent pas de rupture par rapport aux réformes opérées depuis plusieurs décennies qui ont progressivement promu l’accord collectif de travail au rang de mode de production normatif privilégié, de modèle de production normative idéal. La refondation « perpétuelle » du droit du travail vantée par des gouvernements de tous bords et que servirait un discours prônant le renforcement de la négociation collective tiendrait ainsi du discours politique, voire de la lapalissade éculée (I). Est-ce à dire que le modèle de l’accord collectif de travail ne subirait aucun véritable changement ? De toute évidence, la constance avec l’accord collectif de travail est porté aux nues ne doit pas nous aveugler. Des ruptures s’opèrent bel et bien. Car si on ne saurait être étonné par cette célébration de l’accord collectif de travail, il n’en demeure pas moins que se dessine comme jamais au travers de ces ordonnances, une figure renouvelée de l’accord collectif de travail, plus précisément un nouveau modèle, idéel celui-ci, qu’il convient de se représenter (II).

I) Un modèle idéal

L’assertion selon laquelle l’accord collectif de travail serait un modèle idéal a dans une certaine mesure, des allures de tautologie. En effet, à en croire le philosophe, l’idéal désignerait «le modèle qu’on compose en vue de l’admirer et de l’imiter», un modèle «toujours nettoyé d’un peu de réalité qui ferait tâche»11. Triviale, l’affirmation a pour mérite de souligner la distance entre le « réel », le droit positif, et l’idéal, pour ne pas dire le fantasmé.

Reste à déterminer ce qui permet d’ériger l’accord collectif de travail au rang de « modèle idéal », du moins pour ses partisans. Il est relativement aisé de saisir la part d’idéal que recèle le modèle de l’accord collectif de travail : « l’idéal d’une société capable de se réguler elle-même » qui « s’exprime […] dans l’essor contemporain de la négociation collective, et plus généralement dans la contractualisation des rapports sociaux »12. Cet idéal est aujourd’hui largement relayé. Il a acquis, au fil des décennies, une résonance politique, économique, sociale et même académique, digne d’intérêt. Un consensus sur la nécessité de « développer le dialogue social et plus particulièrement l’un de ses outils privilégiés, l’accord collectif » semble ainsi s’être formé autour de l’idée que « le dialogue social (serait) le point de convergence qui permettrait d’assurer l’efficience économique et le progrès social »13. Cette opinion est le reflet d’une confiance14 manifestée à l’égard de la négociation collective et qui explique l’élévation de l’accord collectif de travail au rang de modèle.


10 M. Mekki, « Le modèle de la loi au sein du Code civil » in Code civil et modèles, Des modèles du Code au Code comme modèle, ss la dir. de T. Revet, LGDJ, 2005. Bien qu’évocatrice, spécialement pour le juriste, cette opposition entre le Sein et le Sollen appelle quelques réserves. Le rapport d’opposition bâti autour de ce duo est contestable, car ces deux dimensions « sont inextricablement liées puisque le prescriptif influe sur le descriptif et réciproquement », le modèle étant à la fois « une réalité et un idéal ».
11 Alain, Définitions, Gallimard, Nrf, 1953, p. 66.
12 A. Supiot, Homo juridicus, Seuil, 2005, p. 200.
13 J.-D. Combrexelle, La négociation collective, le travail et l’emploi, France stratégie, sept. 2015, p. 13.
14 L. Thomas, « Confiance », RDT, 2016, p. 759.

A l’origine de l’élévation de l’accord collectif de travail au rang de modèle idéal, on trouve un jugement sur les qualités, les vertus, les traits qui confinent l’accord collectif de travail, à tort ou à raison, dans une certaine image de la perfection. La difficulté réside dans l’identification de ces qualités. Elle ne peut résulter que de l’exégèse des ordonnances, d’une analyse discursive des textes qui annoncent et qui expliquent leur teneur et qui proviennent de préférence des acteurs qui les ont portées. L’exposé des motifs, l’étude d’impact, des divers textes qui nous intéressent se révèlent précieux dans cette entreprise même s’il faut l’admettre, le discours tient parfois de la logorrhée. Il n’en reste pas moins instructif. Il ne s’agit pas de dresser ici un panorama exhaustif des qualités qui sont traditionnellement prêtées à l’accord collectif de travail mais bien de mettre l’accent sur les qualités qu’entendent renforcer les ordonnances du 22 septembre 2017.

A) Proximité et adaptabilité de l’accord collectif de travail

 La négociation collective serait selon une opinion relayée en doctrine, « génératrice d’un droit du travail décentralisé et de proximité qu’elle soit nationale, de branche ou d’entreprise »15. Derrière ce discours, c’est l’éloge du terrain et du particularisme qui transparaît.

Tout d’abord, l’éloge du terrain ressort assez nettement de l’exposé des motifs de la loi d’habilitation à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du dialogue social du 15 septembre 2017. Il est ainsi soutenu que « trouver les solutions innovantes pour articuler performance sociale et performance économique, pour allier bien-être et efficacité au travail, ne peut se faire qu’au plus près du terrain, par un dialogue entre les acteurs directement concernés ». Autrement dit, il est soutenu que les solutions ne doivent plus venir d’en haut selon un schéma vertical, sans aucun échange avec ceux qui vivent les situations concrètes sur le terrain, au quotidien.

L’éloge du particularisme transparaît ensuite de l’objectif assignée à la réforme : remédier aux maux d’un droit du travail qui a été « conçu historiquement pour organiser les relations de travail dans les grandes entreprises industrielles et qui « ne répond plus à la diversité des entreprises, des secteurs, des parcours et des attentes des salariés ». Plus encore, il est soutenu qu’« au lieu de protéger les salariés et de soutenir l’activité des entreprises, il fragilise parfois les premiers en imposant des règles rigides qui sont souvent contournées dans la pratique et freine le développement des secondes, par sa difficulté à s’adapter rapidement à la réalité changeante des situations économiques ». L’idée est simple, voire simpliste. Elle peut s’expliquer en quelques phrases. La protection juridique des salariés contre la rupture de leur contrat de travail serait devenue trop forte et dissuaderait les employeurs, notamment les investisseurs étrangers, d’embaucher.

Le droit du travail serait un fauteur de chômage16 et ne permettrait pas de s’adapter aux « réalités » des situations économiques. Il s’agit d’y remédier en favorisant le « dialogue social »17 et en privilégiant par là même les règles construites par les acteurs eux-mêmes plutôt que celles d’origine légale. Le droit du travail, ancien modèle, serait ainsi, selon une thèse en vogue, source d’inefficacité. Peu discutée, la critique mériterait que l’on s’attarde sur sa teneur. Rapidement, on rappellera que l’efficacité désigne communément le « caractère de ce qui est efficace », c’est-à-dire de ce qui « produit l’effet qu’on en attend »18. Elle marque l’aptitude d’un mécanisme à produire les effets attendus. Autrement dit, l’efficacité du droit du travail devrait s’apprécier à l’aune des finalités qu’on lui prête. Or, l’identification formelle de ces finalités n’est pas toujours assurée. Dit de manière plus explicite, l’efficacité du droit du travail est-elle appréciée à l’aune d’indicateurs sur la performance économique de l’entreprise ou bien de l’étendue des droits et avantages reconnus aux salariés ? De plus, le renvoi opéré aux « réalités » économiques laisse circonspect. Prétendre pouvoir proposer une « description élémentaire de la réalité » et des mesures qu’elles imposent d’adopter laisse songeur.


15 G. Loiseau et A. Martinon, « La négociation paradoxale », Cahiers sociaux, 2014, p. 213.
16 A. Jeammaud, « Le droit du travail en changement », Droit social, 1998, p. 211.
17 Sur le sens de cette notion, cf. D. Benrebai et N. Di Camillo, « Dialogue social », RDT, 2016, p. 754.
18 Sur la notion d’efficacité, cf. A. Jeammaud et E. Serverin, « Evaluer le droit », D., 1992, p. 263.

On comprend bien que derrière le recours abusif à cette notion, c’est la conviction de l’auditoire que l’on cherche à emporter, non sans artifice lorsqu’aucun raisonnement fondé ne vient au soutien de pareil propos. Cet éloge du particularisme emporte dans les ordonnances du 22 septembre 2017 célébration de l’accord décentralisée19. Sur ce point, l’invocation d’un quelconque principe d’égalité justifiant une application uniforme de la norme est rejetée. La norme doit tenir compte de la diversité « des salariés de toutes les entreprises, quels que soient la taille et le secteur ». Pour résumer, le postulat est le suivant : les normes conventionnelles, adaptées au contexte économique et social dans lequel elles sont amenées à jouer, permettent de dessiner un cadre juridique de travail contribuant à un meilleur fonctionnement de l’entreprise, facteur de gains de productivité20. C’est pourquoi, il est convenu d’accorder à l’accord d’entreprise une primauté de principe sur l’accord de branche. Toutes les matières ne relevant pas du champ de la primauté de l’accord de branche limitativement défini par la loi relèvent du champ de la primauté de l’accord d’entreprise. A ce titre, il importe peu que ce dernier soit conclu antérieurement ou postérieurement à la date d’entrée en vigueur de l’accord de branche. Ce dernier ne s’applique alors qu’à défaut d’accord d’entreprise21.

B) Sécurité de l’accord collectif de travail

 L’accord collectif de travail est parfois perçu comme un vecteur de sécurité juridique. Cette sécurité serait même l’apanage du droit conventionnel d’après certains auteurs. Traditionnellement, la sécurité juridique est notamment perçue comme une exigence d’ordre temporel tenant plus à la stabilité et la prévisibilité de la norme. Elle est en ce sens, une sécurité d’ordre temporel. Il fut un temps où la stabilité de la norme conventionnelle résultait d’une certaine permanence du statut collectif. La règle du maintien des avantages individuels acquis en l’absence de conclusion d’un accord de substitution suite à la dénonciation ou la mise en cause d’un accord, était garante de cette stabilité. On le sait, la loi du 8 août 2016 est venue en partie à bout de cette logique22. En lieu et place de feu les avantages individuels acquis, l’article L. 2261-13 du Code du travail prévoit que les salariés conserveront, en application de l’accord dénoncé, une rémunération dont le montant annuel ne pourra être inférieur à la rémunération versée lors des douze derniers mois. La loi a du 8 août 2016 surtout suggéré que la véritable insécurité résidait dans le « décalage entre une norme conventionnelle qui n’a pas su évoluer, s’adapter aux besoins de l’entreprise et la réalité vécue et connue par tous »23. Une nouvelle compréhension de l’exigence de sécurité a ainsi pris forme.

Le rapport d’égalité établi est net. L’adaptabilité de la norme conventionnelle, son évolution, est source de sécurité. L’ordonnance relative à la réforme de la négociation collective ne modifie pas cette donne en s’inscrivant dans le registre de l’adaptabilité. Elle va même plus loin en préservant l’accord collectif, au nom de cette exigence de sécurité, des interventions judiciaires que les instigateurs de la réforme jugent excessives. L’article L. 2262-14 du Code du travail fixe ainsi à deux mois le délai de recours en nullité contre les accords collectifs. Or, de l’aveu même du Conseil constitutionnel, par cette disposition, « le législateur a entendu garantir leur sécurité juridique en évitant qu’ils puissent être contestés longtemps après leur conclusion ». Dans la même lignée, l’article L. 2262-13 du Code du travail précise qu’il « appartient à celui qui conteste la légalité d’une convention ou d’un accord collectif de démontrer qu’il n’est pas conforme aux conditions légales qui le régissent ». Le sens de cette disposition est précisé par l’étude d’impact de la loi d’habilitation. L’objectif est de donner une assise plus solide à la jurisprudence applicable en matière d’accords collectifs de travail prévoyant des différences de traitement initiée par les arrêts du 27 janvier 2015. Il s’agit d’après le texte «d’une sécurisation indispensable si l’on souhaite que les acteurs de la négociation d’entreprise se lancent dans ce vaste chantier en confiance».


19 E. Peskine, « La célébration de l’accord collectif d’entreprise », Droit social, 2014, p. 438.
20 Y. Leroy, « Paradoxe(s) sur ordonnances », Droit social, 2018, p. 784.
21 Art. L. 2253-3 du Code du travail.
22 Loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels.
23 X. Bertrand, « Quel sens ont les réformes ? », RDT, 2008, p. 354.

Mieux, s’inspirant d’une règle jurisprudentielle dégagée par le Conseil d’état à propos des accords d’assurance chômage, il est désormais admis qu’en cas d’annulation par le juge de tout ou partie d’un accord collectif, celui-ci pourra décider que l’annulation ne produira ses effets que pour l’avenir ou de moduler les effets de sa décision dans le temps.

Alors que cherche-t-on à garantir ? Qui cherche-t-on à sécuriser ? Vraisemblablement, il s’agit de tarir le contentieux qui a pu se développé autour d’accords collectifs sensibles en raison de leur objet, ceux ayant par exemple pour objet les conventions de forfait-jours. Il s’agit donc, dans une mesure certaine, de préserver l’employeur d’un aléa judiciaire réputé contre-productif.

C) Légitimité de l’accord collectif de travail 

Si les ordonnances du 22 septembre 2017 ne renvoient pas formellement à la nécessité de renforcer la légitimité de la norme conventionnelle, autrement dit de ses signataires, elles sont néanmoins imprégnées de cette exigence. L’étude d’impact de la loi d’habilitation nous le rappelle, la réforme opérée s’appuie sur les réformes menées précédemment : réforme de la représentativité aussi bien des organisations syndicales que patronales mais encore réforme des conditions de validité des accords collectifs de travail. En effet, «au cœur de plusieurs réformes emblématiques ayant affecté notre droit du travail depuis une quinzaine d’années, la règle majoritaire vise à assurer la légitimité des conventions et accords collectifs de travail»24.

De la légitimité des interlocuteurs sociaux, dépendrait selon une certaine logique, l’effectivité des accords collectifs. Car les sujets de droit seront d’autant plus enclins à appliquer la norme qu’ils auront participé à son élaboration. Voici pour le discours traditionnellement tenu. Mais comment se situent les ordonnances de l’automne 2017 dans cette grille de lecture ? Cette réforme fait « le pari de la confiance et de l’intelligence collective des entreprises, des salariés et de leurs représentants, au premier rang desquels les organisations syndicales ». Cette confiance évoque un acte de foi qui commande la limitation du rôle de la loi et sa relégation au rang de norme supplétive. En cela, les ordonnances de l’automne 2017 confortent le mouvement initié par la loi du 8 août 2016. En quoi innovent-elles alors ? D’après l’étude d’impact de la loi d’habilitation, « une modification législative est nécessaire pour enclencher le mouvement qui légitimera le rôle et la place des partenaires sociaux dans l’entreprise ». On croyait les partenaires sociaux devenus légitimes, ils ne l’étaient pas assez, du moins leur rôle et leur place dans l’entreprise. Qu’est ce qui fonde ce diagnostic ? D’après l’étude d’impact, deux raisons expliqueraient ce constat. D’une part, liberté conventionnelle oblige, «l’expérience montre que la seule incitation à négocier ne suffit pas pour provoquer l’enclenchement de négociations et moins encore la conclusion automatique d’accords». D’autre part, «les pouvoirs publics, qui se voient souvent reprocher de trop intervenir réglementairement et de se substituer ainsi aux partenaires sociaux, ont constaté que la négociation pouvait ne jamais aboutir, en particulier dans les domaines faisant l’objet de politiques publiques visant à combler un retard ou un écart». Sont visés ici les expériences de négociation dite administrée25.

En somme, il est reproché aux interlocuteurs sociaux de n’avoir pas suffisamment investi le terrain de jeu que le législateur leur a aménagé. C’est pourquoi, il est proposé d’« installer durablement une culture de la négociation et de la concertation dans le pays ». Il est proposé pour ce faire, entre autres, d’assurer la prévalence des accords de performance collective sur le contrat de travail, de renforcer l’autonomie des interlocuteurs sociaux dans l’organisation du dialogue social dans l’entreprise, spécialement concernant la négociation obligatoire et de faciliter les modalités de conclusion des accords collectifs en facilitant le recours à la consultation des salariés pour valider un accord. Tout cela donne à voir une image rénovée de l’accord collectif de travail comme modèle idéel.


24 G. Auzero, « La légitimité intrinsèque de l’accord collectif et la règle majoritaire », Droit social, 2018, p. 154.
25 Sur cette notion, cf. F. Canut et P.-Y. Verkindt, « Négocier sous contrainte. Un nouveau visage de la négociation collective en France ? », in Études en hommage à F. Gaudu, 2014, p. 246.

II) Un modèle idéel 

Idéel, le modèle constitue une référence, un étalon. C’est en ce sens que M. Antoine Jeammaud évoquait dans un article passé à la postérité, la règle de droit comme modèle idéel26, idéel car relevant du monde des idées par opposition au monde matériel. Parler de modèle idéel en droit, c’est surtout admettre qu’une notion issue de l’esprit puisse constituer un référent auquel les juristes trouvent dans leur domaine de multiples fonctions.

Il s’agit ici de prendre la mesure des évolutions opérées par les ordonnances du 22 septembre 2017 et affectant le modèle de l’accord collectif de travail. Une telle entreprise « requiert une claire perception de la configuration initiale de l’objet qui a subi » le changement27. Cela suppose donc de s’interroger préalablement sur ce qui faisait, avant l’adoption desdites ordonnances, la spécificité de l’accord collectif de travail au sein des actes juridiques. Il est proposé ici, de manière classique, de faire état des spécificités observables au stade de sa formation mais aussi de son exécution. De là, l’accord collectif de travail tirerait ses caractères collectif et négocié. Si cela semble relever de l’évidence au premier abord, il apparaît à l’analyse des ordonnances que ces évidences sont tellement mises à mal qu’il convient de se demander ce qu’il advient et ce qu’il reste de la figure de l’accord collectif de travail tel que nous la connaissions jusqu’alors.

A) Un modèle de droit négocié 

Il est traditionnel de voir dans l’accord collectif de travail un acte négocié. N’est-il pas en effet le fruit d’un processus de négociation collective ? Nous n’évoquerons pas en détail ici les débats sur la réalité des négociations menées entre interlocuteurs sociaux même si l’on peut souligner avec d’autres que la volonté des ordonnances du 22 septembre 2017 d’encourager la négociation collective d’entreprise « ne promet aucun supplément de démocratie – sous forme de décentralisation accrue de la production des normes du travail – si le contexte et les conditions de conclusion de ces actes n’assurent pas que les salariés ou ceux qui les représentent disposent d’un véritable pouvoir de négociation »28. Elever l’accord collectif au rang d’acte négocié peut en effet prêter alors à discussion si derrière le processus de négociation se cachent des relations de pouvoir peu propices à l’échange raisonné et que le droit ne permet pas vraiment de canaliser29.


26 A. Jeammaud, « La règle de droit comme modèle », D., 1990, p. 199.
27 A. Jeammaud, « Le droit du travail en changement », Droit social, 1998, p. 211.
28 A. Jeammaud, « Ne rêvons plus de démocratie « économique » ou « industrielle », ne parlons plus de « démocratie sociale », RDT, 2017, p. 576.
29 V. en ce sens, G. Lyon-Caen, « Critique de la négociation collective », Droit social, 1979, p. 350.

Plus fondamentalement, c’est la place centrale accordée au référendum dans les entreprises dépourvues de délégué syndical ou de représentant élu au CSE qui interroge. Le recours à la majorité référendaire pour valider un acte est particulièrement tentant lorsque la légitimité de l’instigateur du référendum est douteuse. Le référendum consiste à inviter, dans un champ donné, un ensemble d’individus à s’exprimer par la voie d’un vote sur un projet relatif à leurs droits et obligations. En l’occurrence, il est question d’élever par cette voie une norme à la qualité d’accord produisant les effets d’un accord collectif de travail. Jusqu’à peu marginale en droit du travail, la technique a connu un net regain d’intérêt qui s’explique, en partie, par le sentiment que les destinataires d’une norme sont moins enclins à en contester la validité s’ils la valident eux-mêmes. La loi du 4 mai 2004 y a eu recours. Cependant, la complexité et la technicité du texte n’ont pas contribué à sa promotion. Bien avant cette loi, la validité de certains accords collectifs avait déjà été soumise à l’organisation d’un référendum. Il en va spécialement ainsi des accords relatifs à l’épargne salariale. Que la voie référendaire puisse être empruntée en la matière n’étonne guère, car l’idée d’associer les salariés motive aussi bien le recours au référendum que l’instauration d’un dispositif d’intéressement ou de participation30. Il n’empêche que le recours au référendum inquiète ceux qui y voient la mort du fait syndical et le reniement d’un modèle de l’accord collectif fondé sur le rôle prépondérant des organisations syndicales représentatives31. Ces craintes n’ont pas refroidi les ardeurs du législateur en 2016 qui a prévu qu’en cas d’exigence majoritaire non remplie et si l’accord a été signé à la fois par l’employeur et par des organisations syndicales représentatives ayant recueilli plus de 30 % des suffrages exprimés en faveur d’organisations représentatives au premier tour des élections professionnelles, quel que soit le nombre de votants, une ou plusieurs de ces organisations ayant recueilli plus de 30 % des suffrages disposent d’un délai d’un mois à compter de la signature de l’accord pour indiquer qu’elles souhaitent une consultation des salariés visant à valider l’accord. L’ordonnance du 22 septembre 2017 relative à la négociation collective ne remet pas en cause le recours au référendum pour pallier l’absence de majorité, confirmant par là même que l’exigence majoritaire ne peut encore être érigée au rang de principe général et qu’un certain pragmatisme commande de ménager des voies alternatives de validation de l’accord pour permettre sa signature quitte à prendre quelques libertés avec l’esprit du texte. C’est dans la multiplication et la diversification de ces voies alternatives que réside toute la difficulté.

A ce titre, l’une des mesures phares de l’ordonnance relative à la négociation collective est la possibilité, dans les entreprises de moins de 11 salariés, de proposer un projet d’accord ou un avenant de révision portant sur les thèmes ouverts à la négociation collective d’entreprise directement auprès des salariés sans passer par un salarié mandaté32. Cette consultation est également autorisée dans les entreprises comprenant entre 11 et 20 salariés en l’absence de membre élu de la délégation du personnel au CSE33. Ces dispositions ont bien été soumises au contrôle du Conseil constitutionnel. Les députés requérants faisaient valoir, à juste titre, que cette disposition permettait à l’employeur de soumettre à la consultation directe des salariés un projet de convention, sans négociation préalable ni a fortiori d’accord, avec les représentants du personnel. Il en résultait, d’après eux, une méconnaissance du principe de participation ainsi qu’une atteinte disproportionnée à la liberté syndicale. Par une formulation désormais classique qui trouve ses origines dans la décision du 6 novembre 199634, le Conseil constitutionnel se retranche derrière l’absence de «monopole de la représentation des salariés en matière de négociation collective» au profit des organisations syndicales, même si on leur concède une «vocation naturelle à assurer, notamment par la voie de la négociation collective, la défense des droits et intérêts des travailleurs». Quelle leçon en tirer ? Il est aujourd’hui admis qu’un accord référendaire puisse être doté des mêmes effets qu’un accord collectif classique, c’est-à-dire négocié et conclu par des organisations syndicales représentatives.


30 Ces dispositifs ont pour objet, l’un « d’associer collectivement les salariés aux résultats ou aux performances de
l’entreprise » (art. L. 3312-1 du Code du travail), l’autre « de garantir collectivement aux salariés le droit de participer aux résultats de l’entreprise » (art. L. 3322-1 du Code du travail).
31 M.-A. Souriac « Regards sur le référendum », Liaisons sociales magazine, n° 84, p. 90.
32 Art. L. 2232-21du Code du travail.
33 Art. L. 2232-23 du Code du travail.
34 Décision n° 96-383 DC du 6 novembre 1996. Sur cette décision, cf. M.-L. Morin, « Le Conseil constitutionnel et le droit à la négociation collective », Droit social, 1997, p. 25 ; B. Mathieu, « Précisions relatives au droit constitutionnel de la négociation collective », D. 1997. 152.

On leur concède une «vocation naturelle à assurer, notamment par la voie de la négociation collective, la défense des droits et intérêts des travailleurs». Quelle leçon en tirer ? Il est aujourd’hui admis qu’un accord référendaire puisse être doté des mêmes effets qu’un accord collectif classique, c’est-à-dire négocié et conclu par des organisations syndicales représentatives. Faut-il pour autant admettre que l’accord pouvant désormais être ratifié à la suite d’un référendum d’initiative patronale qui plus est35, constitue un accord collectif ? Une réponse positive n’est possible qu’au prix d’une dénaturation certaine du modèle de l’accord collectif de travail identifié comme un modèle de droit négocié. Pourtant, l’article L. 2232-22 issu de l’ordonnance relative au renforcement de la négociation collective36, précise bien que lorsque le projet d’accord est approuvé à la majorité des deux tiers du personnel, il est « considéré comme un accord d’entreprise valide ». L’usage du participe passé « considéré » n’est pas anodin. Il faut comprendre par-là que l’accord référendaire sera « tenu pour » un accord d’entreprise valide. Il y a là un aveu de la part du législateur. Il s’agit d’ailleurs d’une précision apportée par la loi de ratification au vu de l’imprécision de l’expression utilisée antérieurement, à savoir celle de simple « accord » sans mention de son niveau de conclusion37. L’accord ainsi élaboré unilatéralement, sans discussion préalable, n’est pas un accord collectif au sens classique mais par ce qui s’apparente à un processus d’assimilation, il en produira les effets. Pour le Conseil constitutionnel, il s’agit « de développer les accords collectifs dans les petites entreprises en prenant en compte l’absence fréquente de représentants des salariés pouvant négocier de tels accords dans ces entreprises »38. Encore une fois, c’est ériger le référendum au rang de palliatif de l’incurie supposée des représentants du personnel. Mais comment ignorer ce que charrie pareille proposition même si le recours au référendum se veut marginal. Comment ignorer que la reconnaissance de l’accord référendaire ravive un débat vieux de plus d’un siècle, à savoir qu’est ce qui confère à l’accord collectif de travail son caractère collectif ?

On pensait le débat clos, l’accord collectif tirant son caractère collectif de ses signataires, les syndicats représentatifs. A ce titre, l’accord collectif de travail est perçu de longue date comme un modèle syndical39. Avec le référendum, ce sont les théories, celles d’André Rouast tout particulièrement, faisant du contrat collectif l’émanation « d’un groupement non personnalisé ou qui est passé en dehors de toute intervention d’un être moral, et qui, par suite de son caractère unitaire lie tous les individus de ce groupement, même les opposants »40. L’acte serait individuel « parce qu’il émane d’un individu » et collectif « parce qu’il émane d’une collectivité »41. L’explication a le mérite d’être claire, elle soulève toutefois quelques interrogations rapportées à l’accord collectif de travail. C’est donc la majorité qui fait loi dans le contrat collectif et qui impose sa manière de voir parce que l’application à tous de la règle majoritaire est le seul moyen d’éviter la survenance de la grève. Or, de quelle meilleure manière, peut se dégager cette majorité que par le biais d’un vote ? Le collectif se fait alors pluriel par l’addition des suffrages de chacun et non plus l’expression d’une entité singulière qui transcende les membres qui la composent.


35 Art. L. 2232-12 du Code du travail.
36 Ordonnance n° 2017-1385 du 22 septembre 2017 relative au renforcement de la négociation collective.
37 Art. 2 de la loi n° 2018-217 du 29 mars 2018 ratifiant diverses ordonnances prises sur le fondement de la loi n° 2017-1340 du 15 septembre 2017 d’habilitation à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du dialogue social.
38 Décision n° 2018-761 DC du 21 mars 2018, considérant n° 7. V. Bernaud, « Le Conseil constitutionnel valide pour l’essentiel la loi portant ratification des ordonnances réformant le code du travail », Droit social, 2018, p. 493.
39 Sur ce point, cf. C. Didry, « La production juridique de la convention collective. La loi du 4 mars 1919 », Annales.Histoire, Sciences sociales, 2001, p. 1254.
40 A. Rouast, Essai sur la notion juridique de contrat collectif dans le droit des obligations, thèse Lyon, 1909, p. 86.
41 Ibid., p. 78.

B) Un modèle de droit collectif

Au titre des évidences mises à mal par les ordonnances du 22 septembre 2017, on trouve également l’idée selon laquelle l’accord collectif tirerait son caractère collectif de ses effets.

En effet, l’accord collectif de travail produirait à la fois une force juridique en extension (l’effet erga omnes) et une force juridique en intensité (l’effet impératif de l’accord collectif sur les contrats de travail). Longtemps, cette emprise du collectif ne se comprenait qu’eu égard à la présomption selon laquelle, au nom d’un principe de faveur, l’accord collectif avait vocation à améliorer le sort des salariés.

L’introduction des accords dits de performance collective invite plus que jamais à mettre en cause cette présentation42. Pour rappel, ces accords peuvent, aux termes de l’article L. 2254-2 du Code du travail, modifier certains éléments de l’organisation du travail, de la rémunération des salariés ou de leur mobilité géographique ou professionnelle afin de répondre aux nécessités liées au fonctionnement de l’entreprise ou en vue de préserver ou de développer l’emploi. Mieux, les stipulations de cet accord se substituent de plein droit aux clauses contraires du contrat de travail sans que l’on sache encore si cette modification est irréversible, autrement dit au terme de l’accord de performance collective, le contrat de travail pourra être appliqué aux conditions antérieures à la conclusion dudit accord. Le salarié qui s’oppose donc à l’application d’un accord de performance collective valablement conclu peut être licencié pour cette seule raison, refus qui constitue alors un motif spécifique de licenciement et surtout une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Pareil régime s’expliquerait en partie si ces accords de performance collective contenaient à l’instar de feu les accords de gestion « ancienne génération », un engagement formel de l’employeur en matière d’emploi43. Du compromis découlerait la force juridique accentuée de l’accord collectif. Mais il n’en est rien s’agissant des accords de performance collective. Est ainsi profondément mise à mal la délicate articulation entre accord collectif et contrat de travail qui était jusqu’alors régie par le principe de faveur et la règle d’autonomie des sources.

Au final, une observation de bon sens doit être émise. L’élévation de l’accord collectif de travail au rang de modèle, surtout idéal, n’est pas neutre. Le modèle, tel qu’on se le représente, tel qu’on le donne à voir, est porteur d’un projet politique. La place et le rôle accordés à la négociation collective au stade de la mise en place et de la détermination des attributions du CSE constituent une illustration prégnante de cette assertion. Dans ce cadre, l’exposé des motifs de la loi d’habilitation du 15 septembre 2017 indiquait que le dialogue social devait être mené dans un « cadre souple ». Ici se niche le paradoxe. La souplesse est recherchée, elle est l’un des maîtres mots de la réforme. Toutefois, cette souplesse s’inscrit dans un cadre rigide. Souplesse car l’accent est mis sur un recours accru à la négociation. Semble se dessiner de la sorte une représentation élue des salariés à géométrie variable, pour ne pas dire à la carte (pour définir le contenu de la plupart des informations récurrentes et ponctuelle, la périodicité des consultations récurrentes, les délais impartis au CSE pour rendre ses avis, la base de données économiques et sociales etc). Souplesse donc mais dans un cadre rigide car à bien y regarder, il n’est pas certain que l’amélioration de l’association des représentants du personnel aux décisions de l’employeur, passe nécessairement par la voie de la négociation dans l’esprit des promoteurs de l’ordonnance. A ce titre, on soulignera que l’ordonnance relative au CSE ne réserve pas la possibilité qu’un accord puisse maintenir plusieurs institutions représentatives au sein de l’entreprise en lieu et place de l’institution unique44. Il existerait ainsi des thèmes sur lesquels le gouvernement ne souhaite pas donner la main aux négociateurs. Manque de confiance ? Excès de dirigisme ? Sans doute faut-il y voir l’expression d’une conviction, l’amélioration de l’association des représentants du personnel des décisions de l’employeur passe par la fusion des institutions représentatives du personnel. La fusion des institutions de représentation du personnel se fera donc à marche forcée et tant pis si on égratigne au passage le modèle de l’accord collectif de travail.


42 Sur ces accords, B. Gauriau, « L’accord de performance collective depuis la loi n° 2018-217 du 29 mars 2018 », Droit social, 2018, p. 504 ; Y Pagnerre, « Les accords de performance collective », Droit social, 2018, p. 694.
43 Malgré une évolution jurisprudentielle sur ce sujet difficile à cerner, v. J. Dirringer et Y. Ferkane, «L’économie générale des «accords de compétitivité» mise sens dessus dessous », Droit ouvrier, décembre 2017, p. 716.
44 Le Conseil d’Etat a d’ailleurs « attiré l’attention du Gouvernement sur la rédaction de l’habilitation, qui ne réserve pas la possibilité qu’un accord puisse maintenir plusieurs institutions représentatives au sein de l’entreprise », CE, 22 juin 2017, avis consultatif n° 393357 sur le projet de loi d’habilitation à prendre par ordonnances les mesures pour la rénovation sociale.

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